Sur M6, Capital dévoile le vrai prix des déchets : décryptage de Zero Waste France
L’exportation des déchets, c’est non !
L’enquête réalisée par Capital pour M6 tend à prouver que des déchets dits « tout-venant et non-dangereux« , collectés à Nice, ont été transférés illégalement en Espagne. Alors que ces déchets étaient supposés être “valorisés” et, au moins pour une partie d’entre eux, recyclés localement, le reportage montre qu’ils ont fini enfouis dans une décharge à ciel ouvert à proximité de Saragosse, à plus de 1000 km de leur point de départ.
Une pratique choquante, qui soulève de nombreuses interrogations sur la gestion de la filière et les moyens de contrôle mis en place pour assurer le respect de la réglementation européenne. Pour demander une politique de réduction et gestion des déchets ambitieuse au niveau européen, et ainsi mieux lutter contre les transferts illicites, Zero Waste France se mobilise avec ses partenaires européens Zero Waste Europe, Rethink Plastic et Break Free From Plastic Europe.
Les gaz fluorés des réfrigérateurs, un danger pour le climat
A Asnières-sur-Seine, le reportage réalisé par Capital montre que les encombrants, qui doivent être collectés séparément, sont traités comme des ordures ménagères. Beaucoup de téléspectateur·ices ont notamment été choqué·es, à raison, de voir les services de la ville écraser un réfrigérateur dans un camion-benne.
En effet, les gaz fluorés souvent contenus dans ce type d’équipement sont un danger pour le climat, car ils peuvent avoir un effet de serre et/ou destructeur de la couche d’ozone très puissant. Ainsi, la part de ces gaz, appelés hydrofluorocarbures, dans les émissions de gaz à effet de serre en France est estimée à 5 % – plus que le trafic aérien.
Décharges : enfouissez, il n’y a rien à voir ?
Capital est également allé à Pavie dans le Gers, pour suivre les associations qui demandent la fermeture d’une décharge, ouverte dans les années 1970. Les riverain·es craignent notamment le dégagement de gaz toxiques suite à plusieurs incendies récents et le « risque de pollution souterraine » lié à des décennies d’enfouissement anarchique.
La mise en décharge de déchets, même supposés « non dangereux », pose dans les faits de nombreux problèmes pour la biodiversité et le climat. Alors que l’impact des déchets sur la biodiversité est souvent réduit aux déchets sauvages, les décharges produisent des eaux polluées (lixiviats), avec un risque réel de contamination des sols et des organismes vivants qu’ils abritent.
Par ailleurs, les décharges sont les premières coupables de l’impact climatique des déchets en France, évalué à 4 % des émissions de GES, selon le Haut Conseil pour le Climat. Elles représentent ainsi 21 % des émissions de méthane et 83 % des émissions de GES du secteur.
Fast-foods : place à la vaisselle réemployable !
A Paris, l’équipe de Capital a suivi les militant·es de Zero Waste France au cours d’une action dans les fast-foods, visant à vérifier si les grandes enseignes respectent bien la loi. En effet, depuis le 1er janvier 2023, tous les restaurants de plus de 20 couverts ont l’obligation de servir les repas sur place dans de la vaisselle réemployable. Après avoir constaté sur le terrain que plus de la moitié des 286 établissements inspectés n’appliquaient pas la loi, l’association a interpellé les enseignes et demandé au ministère de la Transition écologique de renforcer les contrôles.
L’émission donne également la parole au lobby du papier-carton, qui maintient que la vaisselle jetable dans ce matériau est préférable pour l’environnement par rapport à la vaisselle réemployable en plastique choisie par certaines enseignes de restauration rapide. Un argumentaire basé sur des hypothèses de départ très discutables, que Zero Waste France avait déjà déconstruit auparavant.
Seconde vie des meubles : qui est responsable ?
Enfin, l’émission Capital sur M6 montre les dérives des filières REP (responsabilité élargie du producteur), et notamment celles de la REP ameublement. Si la filière affirme s’être fixé un objectif « zéro déchet » pour 2023, dans les faits, le recyclage est favorisé par rapport au réemploi, qui ne concerne qu’1% du mobilier collecté. De plus, les grandes chaînes de distribution de meubles se servent de la revente d’anciens meubles comme argument marketing pour pousser à l’achat de neuf.
Pour que le mobilier dure plus longtemps, Zero Waste France milite afin de faire de la responsabilité élargie du producteur (REP) un instrument au service du réemploi et de l’écoconception des meubles. Plus globalement, quelle que soit la filière, l’association demande l’ouverture d’une concertation sur la refonte de la gouvernance et la raison d’être de la REP.
Les fabricants et vendeurs de meubles sont aussi concernés par le soutien au fonds réparation, créé en 2020 par la loi anti-gaspillage. Malheureusement, le montant de ce fonds a été divisé par deux suite à l’intense lobbying de certains industriels, passant de 20 à 10% des coûts estimés de réparation. Zero Waste France et les Amis de la Terre France ont attaqué le décret qui acte cette décision par un recours déposé le 25 février 2022 devant le Conseil d’Etat.