2023 : place à la vaisselle réutilisable dans les fast-foods !
Depuis le 1er janvier 2023, les restaurants de plus de 20 couverts doivent avoir banni la vaisselle jetable pour tous les repas servis sur place. Zero Waste France revient sur les forces et les faiblesses de la mesure.
Une mesure phare de la loi anti-gaspillage
Le passage à la vaisselle réutilisable dans les fast-foods était LA demande phare de Zero Waste France pendant l’examen du projet de loi anti-gaspillage au Parlement en 2019. Dès 2017, l’association avait mis en lumière la production faramineuse de déchets due à l’enseigne la plus connue en la matière, à savoir McDonald’s. Rien qu’en France, le géant américain était responsable en 2017 de la mise aux ordures de plus d’1 kg d’emballages par seconde. Alors que la réglementation appelle depuis des années à la réduction de la production de déchets, celle de McDonald’s avait augmenté d’environ 20 % rien qu’entre 2013 et 2015 en France. L’association avait également dénoncé l’absence de tri des déchets dans les fast-foods, à travers une campagne de sensibilisation partout en France et une plainte pénale déposée en 2018 à l’encontre d’un McDo et d’un KFC parisiens.
Le plaidoyer de Zero Waste France a payé et la mesure a été votée dans le cadre de la loi parue le 10 février 2020, avec une entrée en vigueur fixée au 1er janvier 2023 pour laisser le temps aux restaurants de s’y préparer. C’est un véritable changement de modèle qui s’annonçait pour les enseignes de restauration rapide, qui ont construit tout leur fonctionnement autour de l’usage unique, jeté par les client·es à la fin du repas.
Depuis le 1er janvier 2023, chaque restaurant, dès lors qu’il sert plus de 20 couverts sur place, doit le faire dans de la vaisselle lavable et réemployable. Ceux qui continuent à utiliser de la vaisselle jetable s’exposent à une amende de 7 500 €, 15 000 € en cas de récidive. Des sanctions administratives peuvent également être infligées par les pouvoirs publics.
La mesure devrait permettre de réduire drastiquement la production de déchets du secteur de la restauration rapide, qui s’élève à environ 220 000 tonnes de déchets par an. Elle comporte néanmoins quelques bémols.
Une loi c’est bien, mais c’est mieux si elle est respectée
À l’approche de l’échéance du 1er janvier 2023, Zero Waste France et d’autres associations se sont inquiétées de la mise en œuvre de la nouvelle mesure à venir dans les enseignes de restauration, notamment rapide. Et pour cause : en 2020, la plupart n’appliquaient pas le tri des déchets en salle, obligatoire depuis… 2016 ! Face à ce précédent peu rassurant, elles ont interpellé les restaurateurs et restauratrices dans une tribune publiée dans Le Journal du dimanche.
Dans l’espoir d’infirmer ces craintes, le mouvement Zero Waste s’est mobilisé au mois de janvier pour aller constater sur le terrain le respect (ou non) de l’obligation de vaisselle réutilisable en salle. Une centaine de militant·es se sont rendu·es en restaurants un peu partout en France : les résultats s’avèrent pour le moins mitigés. Malgré les annonces en grande pompe de plusieurs chaînes, le réutilisable semble loin d’avoir été généralisé.
Sur 286 restaurants Burger King, KFC, McDonald’s et Quick visités, 163 servent toujours les repas pris sur place dans du jetable. KFC et Quick ont la palme, avec 100% des restaurants visités dans l’illégalité. Si 76% des McDo et 41% des Burger King visités sont passés au moins partiellement à la vaisselle réutilisable, les burgers restent enveloppés dans des papiers jetables et les sauces emballées individuellement – une question d’interprétation de la loi, qui laisse malheureusement perdurer trop de déchets inutiles.
Ce 24 janvier 2023, Zero Waste France a adressé des courriers d’interpellation aux quatre enseignes pour leur rappeler la loi et les sanctions encourues, en espérant une rapide mise en conformité. L’association a également mis à disposition un kit de mobilisation pour inviter tous·tes les citoyen·nes qui le souhaitent à interpeller les fast-foods qui continuent de servir les repas dans de la vaisselle jetable.
Le courrier envoyé aux 4 chaînesEn parallèle, l’association a interpellé le ministère de la Transition écologique sur les suites qu’il compte donner : alors que les enseignes de restauration rapide ont été convoquées le 6 janvier 2023 pour communiquer leurs plans d’action sur la mise en place d’une mesure en vigueur depuis le 1er janvier, le grand public n’a pas d’informations sur ce qu’elles comptent mettre en œuvre et à quelle échéance. Les associations Zero Waste France, Surfrider, No plastic in my sea, le Réseau consigne ainsi que le collectif EC2027 appellent à plus de transparence.
Le courrier envoyé au ministèreLe réutilisable c’est bien, mais c’est mieux si c’est sans plastique
Le décret d’application de la loi est resté muet sur la définition de la vaisselle réutilisable et en particulier sur les matériaux devant composer celle-ci. C’est donc la porte ouverte à l’utilisation de plastique solide, de type polypropylène ou tritan, pratique pour sa légèreté, sa résistance à la casse et son faible coût. Le hic : la durabilité de cette vaisselle au fur et à mesure des utilisations et des lavages reste à démontrer – or c’est le nombre de réutilisations possibles qui conditionne l’impact environnemental positif de la mesure. Sans compter les risques pour la santé humaine que pose la migration de microplastiques dans l’alimentation, favorisée par la chauffe répétée du plastique. Pour Zero Waste France, rien de mieux que la vaisselle utilisée en restauration classique, majoritairement composée d’assiettes en céramique et de verres en verre.
Le zéro déchet dans la restauration sur place c’est bien, mais c’est mieux si ça concerne toute la restauration
La fin de la vaisselle jetable en 2023 ne concerne que la restauration sur place, excluant totalement la vente à emporter ainsi que la livraison. Or ces deux modes de restauration ont récemment explosé : avec la crise du Covid-19, la vente à emporter a doublé ses parts de marché dans le circuit de la restauration, de 15% en 2019 à 30% en 2020. En 2021, la restauration rapide a concentré 43 % de la fréquentation totale de la restauration hors domicile. Pour lutter contre la surproduction de déchets du secteur de la restauration, Zero Waste France plaide pour que la loi passe à la vitesse supérieure en contraignant les acteurs de la restauration et de la livraison à bannir le jetable au profit de contenants réutilisables standardisés et consignés.