27 mars 2019
Alice Elfassi

Un rapport alerte sur les effets nocifs du plastique sur la santé tout au long de son cycle de vie

Dans un rapport publié en février 2019, le Center for International Environmental Law (CIEL) alerte sur l'impact sanitaire du plastique.

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Dans ce rapport, intitulé «Plastique et santé : le coût caché d’une planète plastique », le CIEL détaille l’impact global du plastique sur la santé humaine par une analyse précise de chaque étape de son cycle de vie, aussi bien en amont qu’en aval. Le résultat est alarmant : le plastique représente un risque sanitaire à l’échelle mondiale car il a un effet néfaste aussi bien lors de sa fabrication que lors de son utilisation, de son traitement en tant que déchet ou encore de sa dispersion dans l’environnement. Le CIEL invite donc à repenser l’utilisation du plastique en adoptant une approche préventive de réduction à la source pour mettre fin à cette menace sanitaire et environnementale.

Les étapes du cycle de vie du plastique et ses conséquences

Le cycle de vie du plastique est constitué de différentes étapes, qui peuvent chacune avoir des conséquences nocives :

  • L’extraction et le transport de matières premières fossiles (pétrole, gaz, charbon) qui servent à fabriquer le plastique : lors de cette première étape, des substances chimiques et toxiques sont libérées dans l’atmosphère ainsi que dans l’eau et les sols.
  • La transformation de ces matières premières en plastique :  des éléments toxiques et cancérigènes sont alors libérés dans l’atmosphère, en raison des additifs pétrochimiques ajoutés aux polymères vierges. Ces additifs contribuent à donner ses propriétés au plastique (souplesse, transparence, couleur etc.). Durant cette transformation, les accidents sont courants (feux industriels, explosions, rejets chimiques). Ainsi, en 2013, 73 accidents ont été signalés dans l’usine de fabrication de polymère Exxon Mobil, en Louisiane, soit environ 6 par mois. Cela augmente la pollution de l’air et présente un risque pour les travailleurs exposés et les communautés vivant à proximité.

Les additifs

Lors de la fabrication du plastique, de nombreux plastifiants et additifs chimiques sont utilisés afin notamment de donner certaines caractéristiques au produit final : couleur ou transparence, souplesse ou rigidité, imperméabilité à la lumière ou à l’oxygène, retardateurs de flammes, etc. Bien que la toxicité de nombre d’entre eux ait été prouvée, les industriels ne sont pas tenus de rendre publique la liste de ces additifs, qui constituent en moyenne 7 % de la masse des plastiques non fibreux. La majorité d’entre eux n’étant pas fixés solidement au polymère, ils contaminent facilement et durablement l’environnement, c’est-à-dire l’air, l’eau, mais aussi la nourriture ou le corps humain.

  • L’utilisation du produit plastique et des emballages : celle-ci entraîne l’ingestion et l’inhalation de microparticules de plastique et de substances toxiques associées. L’ingestion peut être due au dépôt de produits chimiques présents dans le plastique sur les produits alimentaires ou à la contamination des eaux tandis que l’inhalation est due à un contact direct avec le produit plastique (vêtements, emballages, jouets pour enfants, etc.). Ainsi, une étude menée par Orb Media concernant la contamination de l’eau du robinet montre que des microparticules de plastique sont présentes dans 81% des échantillons d’eau analysés, partout dans le monde. Dans une deuxième étude portant sur l’eau des bouteilles en plastique, Orb Media a trouvé des microparticules dans 93 % des échantillons, avec en moyenne deux fois plus de microparticules présentes dans l’eau en bouteille que dans l’eau du robinet.
  • Le traitement du déchet plastique : à la fin de sa vie souvent très courte, le plastique devient un déchet dont le traitement prend trois formes : l’incinération (souvent présentée comme de la valorisation énergétique), le recyclage ou la mise en décharge. Lorsqu’il est traité dans une usine d’incinération, de nombreuses substances toxiques, telles que le cadmium, le plomb ou le mercure, sont relâchées dans l’environnement proche. En 2015, 12 % des plastiques ont été traités de cette manière et seulement 9 % ont été recyclés dans le monde. Les 79 % restants se sont retrouvés dans des décharges ou encore dans la nature, représentant une source de pollution encore plus importante pour l’eau, les sols et l’air.

Au-delà de ces étapes clés, le plastique est à l’origine d’une pollution, présente tout au long de son cycle de vie, due à une diffusion de microparticules provenant du produit d’origine qui contaminent toutes les zones environnementales (air, eau et sol), mais aussi tous les éléments avec lesquels il est en contact (nourriture, peau, etc.).

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Des impacts sanitaires déjà identifiés

L’omniprésence du plastique dans notre environnement représente un danger sanitaire pour l’homme. En effet, ce produit est en continuelle interaction avec l’environnement humain et finit par s’infiltrer dans le corps humain, par ingestion, inhalation ou contact direct. Ainsi, de plus en plus de microfibres et microparticules plastiques sont retrouvées dans les tissus humains et le système sanguin.

Les effets sur la santé peuvent être divers : impacts sur le système immunitaire et le système respiratoire, perturbations endocriniennes, baisse de la fertilité, hausse des risques de cancers… Ces effets existent à chaque étape du cycle de vie du plastique et démultiplient donc les conséquences sur la santé. Néanmoins, l’impact de la combinaison de ces effets est encore mal connu et ne peut donc pas être appréhendé correctement.

Ces risques concernent tous les individus mais les personnes exposées de façon prolongée (travailleurs dans le domaine du plastique, riverains d’usines, consommateurs quotidiens de produits plastiques) ainsi que les publics vulnérables (enfants, nourrissons et femmes enceintes) sont tout particulièrement affectés.

Une appréhension globale du risque à approfondir

Ce rapport identifie les freins techniques et économiques à la prise de conscience du danger sanitaire que représente le plastique. Est ainsi mis en avant le manque de transparence quant à la composition chimique et aux processus de production du plastique et de ses additifs. Cela complique l’appréhension globale du risque sanitaire posé par le plastique et empêche des études approfondies et documentées. De plus, ce manque d’informations ne permet pas aux consommateurs d’adopter une attitude préventive ni aux communautés et travailleurs exposés quotidiennement d’être avertis des risques qu’ils encourent du fait d’une surexposition. Ces derniers font généralement partie des classes sociales les plus pauvres et marginalisées et n’ont ainsi pas de ressources ou de capacités de mobilisation suffisantes pour faire remonter leurs préoccupations sanitaires auprès des décideurs économiques et politiques.

Des recommandations pour mettre fin à cette menace sanitaire

Les recommandations mettent l’accent sur différents points :

  • Rendre transparents les processus de production ainsi que la composition chimique du plastique, notamment pour permettre aux communautés vivant à proximité de centrales d’extraction, de production ou de traitement de connaître les risques d’une exposition prolongée.
  • Augmenter les recherches pour combler les lacunes actuelles concernant nos connaissances sur le plastique et les additifs associés.
  • Adopter une approche préventive et réduire la production et l’utilisation du plastique, au vu des premiers résultats prouvant l’impact négatif de ce produit sur la santé.
  • Prendre conscience du danger que représente l’ajout d’additifs aux plastiques et assurer une véritable traçabilité de ces additifs.
  • Évaluer et prévenir les effets néfastes des technologies présentées comme des solutions au problème de pollution plastique, telles que l’incinération (ou “valorisation énergétique”) ou encore la transformation du plastique en carburant.
  • Prendre en compte la dimension globale et mondialisée du cycle de vie du plastique pour adopter des mesures internationales afin d’attaquer le problème à la source.

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