Recycler ce qui n’a pu être évité
Si la priorité reste indiscutablement la réduction puis le réemploi et la réparation, il faut néanmoins organiser la gestion des déchets qui restent inévitables. Le tri de ces déchets à la source, le plus en amont possible (chez soi, en entreprise...), est dans ce cas un geste essentiel.
En 2017, la France a produit près de 39 millions de tonnes de déchets ménagers et assimilés (soit environ 580 kg par Français, incluant les déchets de déchèteries, les déchets des commerçants, etc.) : malgré les communications positives des acteurs, seulement 42% sont effectivement recyclés, le reste étant incinéré ou mis en décharge.
Interroger le tout-recyclage
Nombre de producteurs et distributeurs affichent la recyclabilité de leurs produits comme argument marketing : par exemple, pourquoi se priverait-on de consommer une boisson vendue dans une bouteille en PET 100 % recyclable ? Cette communication fait oublier les impacts de l’usage unique et du tout jetable, qu’elle légitime par la perspective de recyclage in fine, faisant du tri le “geste écolo” par excellence et du recyclage la panacée en matière environnementale. Or, si le geste de tri et le recyclage sont évidemment indispensables dans le traitement des déchets inévitables, ils ne doivent pas pour autant se substituer à une véritable démarche de prévention par la réduction à la source des déchets.
Le problème de la non-recyclabilité
Tous les déchets ne sont pas recyclables : il existe de nombreuses substances chimiques ou objets qui constituent des « perturbateurs de tri ». Cela est vrai tant pour les emballages (multi-matériaux non séparables, matières non recyclables…) que certains meubles (non démontables, présence de produits chimiques dangereux…) ou encore des textiles. Tous ces perturbateurs constituent autant de produits non recyclables en tant que tel, voire des polluants qui compromettent le recyclage des autres flux. Pour tous ces produits, il importe désormais que les entreprises manufacturières intègrent l’éco-conception dans leurs processus de fabrication : à terme, il faudra bannir certaines substances chimiques, éviter les multi-matériaux, faciliter la réparabilité, etc.
En tout état de cause, le meilleur déchet reste celui que l’on ne produit pas !
Trier à la source pour recycler ce qui doit l’être
Le geste de tri reste néanmoins essentiel pour permettre d’orienter les déchets qui n’ont pu être évités et qui sont recyclables vers les bonnes filières de traitement. Un déchet qui n’a pas fait l’objet d’un tri à la source est en effet difficilement voire pas du tout valorisable : le recyclage ne peut être réalisé que si les flux de matières sont suffisamment homogènes. Trier a posteriori des déchets qui ont été mélangés (on parle de « sur-tri ») n’est pas toujours techniquement possible, et a un coût qui rend parfois le recyclage moins compétitif. Trier à la source permet donc d’améliorer la qualité des matériaux à recycler, et de réduire les interventions ultérieures de sur-tri.
Plus les déchets sont collectés séparément, plus leur gestion dans chaque filière sera facilitée : cela est vrai pour le verre ou le papier, mais l’est tout autant dans les déchèteries (bois, métaux, piles, déchets verts…). Les collectivités doivent également faciliter le tri dans les espaces publics : à cet effet, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire du 10 février 2020 prévoit la généralisation de la collecte séparée pour recyclage des déchets d’emballages dans l’espace public, notamment par l’installation de corbeilles de tri dans la rue permettant leur tri à la source.
Le tri en entreprise et dans les administrations
Les déchets d’activités économiques (sans compter le secteur du BTP) représentent 70 millions de tonnes en France. Le tri en entreprise est donc tout aussi fondamental pour progresser vers plus de recyclage. Qu’il s’agisse des papiers de bureau, des déchets de chantier ou bien de la restauration rapide, tout le monde doit s’y mettre, car pour les entreprises aussi, les déchets triés sont plus facilement valorisés.
Dans ce but, le tri est désormais une obligation dans toutes les entreprises ou administrations ayant recours à un prestataire privé, ou produisant plus de 1100 litres de déchets par semaine lorsqu’elles passent par la collecte d’une collectivité. Cette obligation est clairement établie par le décret du 10 mars 2016 communément appelé le « décret 5 flux » (plastique, bois, métaux, papier, verre). Sa mise en œuvre tarde cependant, de nombreuses entreprises n’ayant pas encore fait le nécessaire.
De même, l’exemplarité est de mise au sein des administrations de l’Etat et des collectivités territoriales en matière de tri.
Dénonçons le tout-recyclage !
Le recyclage, s’il est indispensable pour une bonne gestion des déchets, ne doit pas devenir une fin en soi ni un écran de fumée qui fait oublier l’impératif de réduction des déchets. Zero Waste France dénonce les limites du recyclage.
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