Interdiction des bouteilles en plastique de petit format : une nécessité pour combattre la pollution plastique

En pleine controverse sur les eaux embouteillées et à quelques semaines de la reprise des négociations internationales sur la pollution plastique, une proposition de loi visant à interdire les petites bouteilles en plastique vient d’être déposée ce jour à l’Assemblée nationale.

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Les associations Zero Waste France, No Plastic In My Sea et Surfrider Foundation saluent cette initiative et demandent sa mise à l’agenda dans les plus brefs délais.

Un premier pas nécessaire pour combattre la pollution plastique

Déposée ce lundi 14 octobre à l’Assemblée nationale par le député Ensemble des Hauts-de-Seine Pierre Cazeneuve, la proposition de loi vise à interdire les bouteilles en plastique de moins de 50 cl à partir du 1er janvier 2027. Au même titre que d’autres dispositions prises par la France et visant à interdire certains plastiques jetables, cette mesure d’interdiction s’inscrit dans la trajectoire de sortie des emballages en plastique à usage unique d’ici 2040, définie dans la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) de 2020. Elle répond par  ailleurs à un jalon majeur de  la loi qui risque de ne pas  être  atteint sans mesure forte : l’objectif de réduction des bouteilles en plastique de 50% de 2018 à 2030, qui exige de passer de 14,7 à 7,3 milliards d’unités commercialisées.

Un million de bouteilles en plastique [1] sont vendues chaque minute dans le monde : moins d’une sur trois sera recyclée”, rappelle Marine Bonavita, chargée de plaidoyer de Zero Waste France. “Plus qu’un symbole fort, bannir les bouteilles en plastique de petit format est un premier pas nécessaire pour couper le robinet de la production de plastique à la source et combattre cette catastrophe sanitaire et environnementale de manière efficace. Nous appelons l’Assemblée nationale à mettre cette proposition de loi à l’agenda au plus vite pour en débattre démocratiquement et aboutir à un texte qui permette à la France de renforcer sa contribution à l’élimination de la pollution plastique”.

La bouteille plastique est le premier  déchet plastique retrouvé sur les plages en Europe ; les petits  formats,  consommés majoritairement en extérieur, présentent un risque accru de dispersion”, indique Muriel Papin, déléguée générale de No Plastic In My Sea. “Face  aux 15 milliards de bouteilles plastiques mises sur le marché en  France, majoritairement pour de l’eau, et  aux résistances  du secteur, qui poursuit ses messages trompeurs et une course  aux volumes, il est indispensable de légiférer et d’interdire les catégories de bouteilles plastiques les plus inutiles et  les plus nuisibles tout en continuant à développer  le  maillage de points d’eau pour  remplir sa  gourde”.

Antidia Citores, Responsable lobby chez Surfrider Foundation ajoute :  « Cette proposition de loi va clairement dans le sens de l’avenir. C’est au nom de la protection de l’Océan, menacé en permanence par les afflux de plastique que nous la soutenons et que nous entendons qu’elle soit menée à son terme. Adopter cette loi sera à la fois un changement sociologique majeur et un pas réel vers la protection des écosystèmes ».

Une relation directe entre production et pollution plastique

Les recherches récentes montrent l’omniprésence du plastique dans le corps humain et dans l’environnement, avec des effets sur la santé humaine et la biodiversité qui commencent à être étudiés et démontrés. Au rythme actuel, la production et l’utilisation de plastique pourraient tripler d’ici à 2060, atteignant 1,2 milliard de tonnes par an selon l’OCDE [2]. Une étude publiée en avril 2024 dans la revue scientifique Science Advances [3] montre qu’il existe une relation directe et linéaire entre la production plastique des entreprises et la pollution plastique liée à leurs produits : pour chaque pourcentage de plastique supplémentaire produit, la pollution plastique augmente d’1%. Cette corrélation concerne tout particulièrement les industriels de l’agroalimentaire et les producteurs de boissons en bouteilles.

La réduction des plastiques, et en particulier des bouteilles qui constituent plus du tiers des emballages ménagers en plastique, est un impératif que le Secrétariat général à la planification écologique (SGPE) [4] a réaffirmé dans son rapport sur l’économie circulaire de juillet dernier : “toute stratégie ne cherchant pas à réduire le gisement est coûteuse en investissements, en impacts, avec des chances de succès faibles”.

Mise à jour du 5 novembre 2024 : une nouvelle proposition de loi déposée au Sénat

Après le député Pierre Cazeneuve, c’est au tour de la sénatrice écologiste Antoinette Guhl de déposer une proposition de loi pour réduire le plastique à usage unique dès 2026.

Cette nouvelle initiative élargit encore le champ des interdictions, en proposant qu’elles s’appliquent :

  • à plusieurs types d’emballages à usage unique, composés de tout ou partie de plastique, y compris en matière recyclée, permettant ainsi limiter les risques de report sur d’autres matériaux à usage unique ;
  • aux bouteilles d’eau de 50 cl, qui sont dans le top 5 des emballages de boissons les plus vendus hors domicile selon l’ADEME (près de 900 millions d’unités en 2018) ;
  • aux produits décoratifs, composés de tout ou partie de plastique, à usage unique.

Par ailleurs, plutôt que de se cantonner au strict respect du droit européen, ce nouveau texte propose que la France « montre une nouvelle fois l’exemple en accélérant la sortie du plastique ». Ainsi, il :

  • avance la date d’entrée en vigueur de l’interdiction, découlant du PPWR, des portions individuelles et petits emballages dans les hôtels, restaurants et cafés (secteur HORECA), de 2030 à 2026 ;
  • intègre dans l’interdiction plus de produits, que ce soit au niveau des matériaux utilisés ou des formats. Alors que l’interdiction européenne des emballages dans le secteur HORECA concerne les emballages de moins de 50 ml, le texte déposé au Sénat couvre ces emballages jusqu’à 100 ml.

Zero Waste France se réjouit de voir les parlementaires de tous bords s’emparer de ce combat essentiel pour la protection de l’environnement et la santé humaine et espère que ces sujets pourront rapidement être discutés au sein des hémicycles.

Chiffres clés

  • 240 000 : nombre de fragments de plastique détectables par litre d’eau embouteillée [5].
  • 68% : part des Français·es favorables à l’interdiction des bouteilles en plastique de petit format.
  • 14,7 milliards : nombre de bouteilles en plastique à usage unique commercialisées en France en 2018, toutes boissons confondues, soit 220 par Français·e [6].

Sources

[1] Single-Use Plastic Water Bottles, A BAD CHOICE BY EVERY MEASURE, Beyond Plastics

[2] Selon l’OCDE, les déchets plastiques produits au niveau planétaire devraient presque tripler d’ici 2060, juin 2022

[3] Global producer responsibility for plastic pollution, Science Advances, avril 2024

[4] SGPE, Économie circulaire. Point sur l’avancée des travaux. Juillet 2024

[5] Rapid single-particle chemical imaging of nanoplastics by SRS microscopy, Proceedings of the National Academy of Sciences – PNAS, janvier 2024

[6] ADEME, Consigne pour réemploi et recyclage des bouteilles de boissons. Définition des dispositifs et analyse comparée avec d’autres modalités de collecte. Rapport final, février 2021.

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