La loi anti fast-fashion détricotée
Lors de son passage en commission développement durable au Sénat, la proposition de loi visant à encadrer les pratiques de la fast-fashion a été percutée par le pouvoir des lobbys. La Coalition Stop Fast-Fashion dénonce un véritable détricotage et regrette que l’ambition du texte ait significativement reculé.
Un encadrement au rabais dont l’examen en séance plénière n’est toujours pas programmé.
Votée à l’unanimité le 14 mars 2024 à l’Assemblée nationale, cette proposition de loi semblait prometteuse pour encadrer les pratiques de l’industrie textile, dont les impacts sur les droits humains et l’environnement sont ravageurs. Cependant, le parcours législatif de cette loi contre la fast-fashion a été stoppé net.
Un an plus tard, en ce mercredi 19 mars 2025, la proposition de loi est revenue sur le devant de la scène, pour mieux reculer.
Un détricotage en règle de la proposition de loi
La Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat a fait le choix de vider la loi de sa substance : allègement des contraintes pour la fast-fashion vendue en ligne, retrait de l’interdiction de la publicité, et surtout, des pénalités éventuelles pour certaines “pratiques industrielles et commerciales” qui ne reposent sur aucune définition solide. De manière assumée par les sénateur·ices membres de la commission, la loi ne concernerait plus aucun des géants européens dont les mauvaises pratiques sont de mieux en mieux documentées et ont fait l’objet de scandales récents.
L’Assemblée nationale avait pourtant établi que les pénalités seraient mises en place selon la méthodologie ambitieuse de l’affichage environnemental français, élaborée par l’ADEME. La Coalition alerte sur la nécessité de réintégrer des pénalités basées sur l’affichage environnemental, pour encadrer les pratiques non-respectueuses de l’environnement.
L’inconnue sur la date de passage au Sénat
L’ordre du jour des prochaines plénières au Sénat a été annoncé, sans que la proposition de loi anti fast-fashion n’en fasse partie. La date du 19 mai a pourtant circulé ces derniers jours, et a de nouveau été mentionnée à l’Assemblée nationale lors de la séance des questions au gouvernement, par la ministre Véronique Louwagie. Aussi, l’absence d’une confirmation officielle en conférence des présidents interroge sur la réelle volonté de faire avancer cette loi tant attendue, de même que sur le niveau d’ambition escompté.
Les conséquences d’une loi sans ambition
Les promesses gouvernementales de réindustrialisation de la France ne pourront être tenues si des articles bas de gamme, produits à l’autre bout du monde dans des conditions de travail indignes et vendus à des prix dérisoires, continuent à inonder le marché français. L’arrivée de la fast-fashion a entraîné la perte de près de 300 000 emplois en France dans le secteur textile depuis les années 90. Aussi, nous demandons aux sénateurs et sénatrices de faire le choix d’une industrie textile française juste, créatrice d’emplois locaux, en pénalisant les marques dont les prix bas cachent des pratiques désastreuses pour l’environnement et les droits humains.
La coalition Stop Fast-Fashion appelle donc les décideur·euses politiques à ne pas céder à la pression des lobbys pour rendre à cette proposition de loi son ambition, et à l’inscrire à l’ordre du jour du Sénat.