Loi anti-gaspillage : quoi de neuf en 2023 ?
Bientôt trois ans après la publication de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, certaines de ses mesures se font encore attendre. Zero Waste France revient sur les changements à venir en 2023, dès le 1er janvier ou un peu plus tard.
Un grand changement dès le 1er janvier : l’interdiction de vaisselle à usage unique pour la restauration sur place
C’était LA demande phare de Zero Waste France pendant l’examen du projet de loi anti-gaspillage au Parlement : le passage à la vaisselle réutilisable dans les fast-foods. Dès 2017, l’association avait mis en lumière la production faramineuse de déchets due à l’enseigne la plus connue en la matière, à savoir McDonald’s. Rien qu’en France, le géant américain était responsable en 2017 de la mise aux ordures de plus d’1 kg d’emballages par seconde. Alors que la réglementation appelle depuis des années à la réduction de la production de déchets, celle de McDonald’s avait augmenté d’environ 20 % rien qu’entre 2013 et 2015 en France.
C’est désormais officiel : à compter du 1er janvier 2023, chaque restaurant, dès lors qu’il sert plus de 20 couverts sur place, devra le faire dans de la vaisselle lavable et réemployable. Ceux qui continueront à utiliser de la vaisselle jetable s’exposeront à une amende de 7 500€. Un véritable changement de modèle pour les enseignes de restauration rapide qui ont construit tout leur modèle autour de l’usage unique, jeté à la fin du repas. Zero Waste France sera au rendez-vous pour vérifier que les établissements respectent bien leurs nouvelles obligations en la matière, et sera vigilante quant à la réelle durabilité des matériaux choisis.
Une mesure retardée au 1er avril 2023 : la fin de l’impression automatique des tickets de caisse
En 2023, finie l’impression et la distribution automatique des tickets de caisse (y compris en caisse automatique), tickets de carte bancaire ou encore bons d’achats et tickets promotionnels, sauf si les client·es en font la demande. Cette mesure est bienvenue pour limiter les déchets papiers, l’immense majorité des tickets de caisse étant destinés immédiatement aux ordures ménagères : d’après un rapport réalisé en 2020 par l’association Zéro Déchet Strasbourg en collaboration avec des universitaires, seuls 9% des personnes interrogées conservent leur ticket de caisse après leur passage en magasin.
La mesure devait s’appliquer dès le 1er janvier, sous réserve de l’adoption d’un décret qui devait en fixer les conditions d’application, très attendues pour garantir le respect des droits des consommateurs et consommatrices à accéder à leurs informations de paiement. Adopté in extremis le 14 décembre 2022, ce décret retarde finalement l’entrée en vigueur au 1er avril 2023. Il prévoit également que certains tickets puissent continuer à être automatiquement distribués, notamment ceux faisant mention d’une garantie légale de conformité ou démontrant de l’échec d’un paiement par carte bancaire. En outre, il impose aux enseignes d’informer clairement les client·es quant à la non-impression automatique des tickets et à leur droit d’en faire la demande.
2023, année du retour de la consigne ?
Après des débats enflammés sur les bancs parlementaires concernant la mise en œuvre (ou non) de dispositifs de consigne des emballages, la loi anti-gaspillage avait finalement renvoyé la balle au Gouvernement, chargé de prendre une décision en 2023. Encore faudrait-il savoir de quelle consigne on parle…
C’est la consigne pour recyclage des emballages qui a créé l’émoi pendant les débats parlementaires : plébiscité par les producteurs d’emballages plastiques, ce système de retour de l’emballage contre le remboursement d’une consigne payée lors de l’achat pour l’orienter ensuite vers un parcours de recyclage est loin de faire l’unanimité parmi les collectivités locales, d’ores et déjà en charge de la collecte et du tri des emballages. La consigne pour réemploi, dispositif dans lequel l’emballage retourné est lavé puis rempli de nouveau avant d’être remis en vente, a pâti de cette cristallisation des débats autour de l’enjeu du recyclage. Elle risque de nouveau d’être la grande oubliée de la décision attendue en 2023 sur le sujet.
Le réemploi fait partie des revendications récurrentes de Zero Waste France, qui compte rester particulièrement vigilante à ce qu’il soit au cœur des décisions à venir sur la consigne dans les prochains mois.
Un an pour mettre en place le tri à la source des biodéchets partout en France
Le tri des biodéchets est une demande forte de Zero Waste France depuis des années, et pour cause : c’est une mesure incontournable de réduction des déchets à l’échelle d’un territoire. Une valorisation de ces déchets organiques par compostage voire méthanisation est bénéfique tant pour le climat et la biodiversité que pour les sols, notamment agricoles. Elle permet aussi de détourner un tiers de la poubelle noire de la décharge ou de l’incinérateur.
Si les personnes (entreprises, restaurants…) qui produisent plus de 5 tonnes de biodéchets par an devront les trier à la source dès le 1er janvier 2023 (jusqu’à présent, seules celles en produisant plus de 10 tonnes étaient concernées), l’obligation de tri à la source pour tous les producteurs de biodéchets et particulièrement les collectivités locales n’entrera en vigueur qu’au 31 décembre 2023. A cette date, toutes les collectivités devront donc proposer à leurs concitoyen·nes une solution de proximité pour trier leurs épluchures et autres restes organiques. Un nouveau geste de tri dont les modalités minimales à organiser par les collectivités sont laissées dans le flou par la loi : suffira-t-il de mettre à disposition des composteurs individuels ou faudra-t-il déployer des moyens de collecte suffisants – variables et complémentaires en fonction du type de territoire – pour effectivement sortir la majorité des biodéchets de la poubelle de tout-venant ?
Si quelques collectivités sont déjà prêtes ou presque, Zero Waste France est très inquiète quant à la mise en œuvre de cette mesure essentielle pour la transition “zéro déchet” des territoires – pourtant prévue depuis près de 8 ans !
Interdiction des emballages plastiques pour les fruits et légumes : un nouveau décret à venir pour 2023
Depuis le 1er janvier 2022, la vente de fruits et légumes frais sous plastique est interdite, sauf exceptions. C’est le décret n° 2021-1318 du 8 octobre 2021 qui fixait jusqu’à présent la liste des fruits et légumes qui peuvent continuer à s’afficher sous plastique, et le calendrier progressif de levée d’exemptions associé.
Attaqué en justice par plusieurs fédérations professionnelles, ce décret a été annulé par le Conseil d’Etat le 9 décembre dernier, empêchant l’application de l’interdiction. Un nouveau décret est actuellement soumis à consultation publique jusqu’au 12 janvier et prévoit qu’une vingtaine de fruits et légumes puissent continuer à être emballés sous plastique, de façon pérenne cette fois-ci. Pour les fruits et légumes tombant nouvellement sous le coup de l’interdiction en 2023, un délai d’écoulement des stocks sera prévu jusqu’à la fin de l’année. Ce n’est pas encore cette année que l’on arrêtera de voir des fruits et légumes entourés de plastique… Zero Waste France est bien sûr mobilisée pour que ce nouveau texte soit le plus ambitieux possible !
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