Loi Climat : une régulation de la publicité insuffisante malgré quelques avancées
Le 17 avril 2021, l’Assemblée nationale a achevé l’examen en première lecture du projet de loi Climat et résilience. Les dispositions du texte relatives à la régulation de la publicité s’avèrent largement insuffisantes au regard de l’impact environnemental du secteur, malgré quelques avancées encourageantes.
Une occasion manquée d’interdire les supports et contenus publicitaires néfastes pour l’environnement
Au sein du projet de loi Climat, le Chapitre II du Titre I “Consommer” est dédié à l’encadrement et à la régulation de la publicité, thématique qui avait fait l’objet de nombreuses propositions de la Convention citoyenne pour le climat (CCC). En effet, la publicité a été identifiée comme un secteur fortement polluant, à la fois matériellement via ses supports (numériques ou papier) et immatériellement par les incitations à la (sur)consommation qu’elle génère. De plus, le secteur publicitaire représente un poste de dépenses considérable : le rapport « Big Corpo : encadrer la publicité et la communication des multinationales, un impératif écologique et démocratique », élaboré par un collectif de 22 ONG, souligne qu’en France, chaque année, 31 milliards d’euros sont dépensés en publicité, soit l’équivalent des dépenses privées en recherche et développement.
Ce chapitre du projet de loi Climat comporte plusieurs articles, marquant certaines avancées vers une meilleure régulation publicitaire, mais loin des ambitions des 150 citoyen·ne·s.
Ainsi, alors que la Convention citoyenne demandait “l’interdiction de la publicité des produits les plus émetteurs de gaz à effet de serre, sur tous les supports publicitaires”, l’article 4 du projet de loi prévoit l’interdiction de “la publicité relative à la commercialisation ou faisant la promotion des énergies fossiles” (pétrole, charbon…). Or, la publicité pour ce secteur n’existe déjà quasiment pas ! Une infime quantité de publicités seront concernées par cette mesure, qui n’apporte donc rien à la régulation publicitaire et apparaît grandement dépourvue d’ambition environnementale.
Des interdictions de certaines formes de publicité sont bel et bien prévues par le texte, visant les banderoles tractées par avion ainsi que la distribution d’échantillons en l’absence de demande du consommateur, mais il est à déplorer qu’aucune interdiction ne vise les produits et services, notamment les véhicules, particulièrement polluants – ceux-ci ont beau fonctionner à l’énergie fossile, ils ne sont pas concernés par l’interdiction prévue.
Voir le climatomètre du RACA cet égard, le projet de loi a davantage misé sur l’auto-régulation du secteur, via des codes de bonne conduite promus par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, que sur de la coercition, pourtant nécessaire au vu de l’urgence environnementale et climatique actuelle. Il en est de même concernant la réglementation de la publicité lumineuse dans les vitrines, qui est renvoyée au pouvoir de police du maire dans le cadre de l’élaboration du règlement local de publicité. Il est à craindre qu’un tel désengagement de l’Etat ne nuise à l’application concrète de mesures fortes de régulation de la publicité.
L’échec de l’auto-régulation vu par FNEQuelques minces avancées vers une limitation du greenwashing et du gaspillage publicitaire
En matière de régulation de la publicité, le projet de loi ajoute à la liste des pratiques commerciales trompeuses, condamnées par le code de la consommation, celles qui reposent sur un mensonge quant à l’impact environnemental du produit ou aux engagements environnementaux de l’annonceur. Pour la condamnation de ces pratiques de greenwashing, est prévue une peine d’amende à hauteur de 80% des dépenses engagées pour la réalisation de la publicité en question. Zero Waste France salue ces évolutions, dont la mise en application concrète devra être surveillée.
Par ailleurs, malgré de vives oppositions des acteurs de la grande distribution, l’article 9 du projet de loi Climat prévoit une expérimentation de trois ans du dispositif “Oui Pub”, qui consiste à interdire la distribution de publicités non-adressées dans les boîtes aux lettres, sauf accord exprès manifesté par un autocollant “Oui Pub”. Cette inversion du dispositif actuel “Stop Pub”, demandée par la CCC, doit être expérimentée dans les collectivités locales volontaires, afin d’évaluer ses impacts à la fois environnementaux, économiques et sociaux.
Si Zero Waste France peut comprendre le principe d’une expérimentation avant généralisation, elle plaide en revanche pour que le texte précise explicitement qu’en cas de bilan positif de l’expérimentation, le dispositif “Oui Pub” sera pérennisé sur l’ensemble du territoire. En effet, cette mesure devrait permettre de limiter le gaspillage publicitaire lié à la distribution de prospectus, qui représente un quart du papier consommé en France. Zero Waste France s’interroge par ailleurs sur les motivations des divers amendements venus réduire la portée de l’expérimentation en limitant son application à maximum 10 % de la population française.
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Obtenir un autocollant « Stop Pub »Zero Waste France espère désormais que les débats au Sénat ne fassent pas reculer les mesures de lutte contre le greenwashing et le gaspillage publicitaire, et permettent au contraire de réglementer davantage les contenus et supports publicitaires polluants.