Consigne pour réemploi : pour qu’elle revienne (enfin) !
Assistera-t-on finalement au retour de la consigne pour réemploi des emballages ? Zero Waste France poursuit sa mobilisation en faveur du réemploi.
Mise à jour du 29 août 2024 : lancement d’une expérimentation dans 4 régions
Le 20 août 2024, Jean Hornain, directeur général de Citeo, et Célia Rennesson, directrice de Réseau Vrac et Réemploi, ont annoncé dans Ouest-France le déploiement à grande échelle de la consigne pour réemploi du verre dans 4 régions françaises : la Bretagne, les Hauts-de-France, la Normandie et les Pays de la Loire. Dans ces territoires, à partir de mai 2025, les consommateur·ices pourront se rendre dans les 1000 super- et hypermarchés participants pour acheter différents types de produits conditionnés dans des emballages standardisés et réemployables en verre : soupes, jus de fruits, fromages blancs, compotes, légumes en conserve, bière… Le montant de la consigne, autour de 20 à 30 centimes, sera restitué au retour du contenant en magasin. Les emballages seront ensuite lavés et réemployés.
Zero Waste France salue cette initiative, mais rappelle que sortir de l’usage unique pour mettre fin à la pollution plastique est une urgence environnementale, sanitaire et sociale. L’heure n’est plus à l’expérimentation. Les Français·es sont prêt·es : 92% sont favorables à la réintroduction d’un système de consignation dans le pays selon Ipsos.
Ramener ses contenants en magasin doit (re)devenir, et vite, un geste quotidien accessible à tou·tes les citoyen·nes. Pour cela, les super- et hypermarchés doivent être soumis à une obligation de reprise des emballages réemployables. Par ailleurs, les marques qui continuent de commercialiser des produits dans des emballages à usage unique, alors qu’une alternative réemployable existe, doivent être pénalisées financièrement.
Dossier de presse (décembre 2023)Mise à jour du 22 juin 2023 : feu vert pour la consigne pour réemploi
La secrétaire d’État à l’Écologie Bérangère Couillard a annoncé aux médias la mise en place de la consigne des emballages en verre pour réemploi en France d’ici deux ans. Zero Waste France et Surfrider Foundation Europe saluent cette annonce du gouvernement, qui va dans le sens de l’objectif de fin des emballages plastiques à usage unique fixé pour 2040. Les deux associations attendent cependant sa concrétisation rapide et d’autres mesures complémentaires pour réduire la pollution plastique.
Lire le communiqué de presseLes questions que vous vous posez sur la consigne
La consigne, comment ça marche ?
La consigne désigne une somme d’argent supplémentaire (quelques centimes) payée à l’achat d’un produit emballé à son point de vente et récupérée lorsque l’emballage est rendu. Historiquement, la consigne était appliquée en France sur les bouteilles et emballages en verre, pour permettre leur réemploi (récupération, lavage et re-remplissage du récipient). Cette pratique a progressivement disparu au profit des emballages jetables, notamment en plastique.
La consigne pour réemploi : quels bénéfices pour l’environnement ?
Le réemploi des emballages permet de réduire leur impact sur le climat et la biodiversité. Les performances environnementales du dispositif varient selon plusieurs critères : distances et modes de transport, nombre de réutilisations, performance de lavage, matériaux utilisés et procédés de fabrication, etc. Ainsi, la consigne pour réemploi peut être bénéfique pour l’environnement également sur des distances allant jusqu’à 1 200 km, d’autant plus lorsque l’emballage est réemployé de nombreuses fois dans le cadre de systèmes optimisés. De même, le lavage des emballages ne consomme pas nécessairement plus d’eau que les emballages jetables, la fabrication d’un emballage en plastique ou en verre nécessitant également une forte consommation d’eau. L’exemple du système de consigne pour réemploi mis en place par la brasserie Météor en Alsace donne une idée du gain environnemental potentiel de ces dispositifs s’ils sont déployés de manière efficace : une étude de 2009 a démontré que ce dispositif permettait d’économiser 76 % d’énergie primaire, d’éviter 79 % d’émissions de gaz à effet de serre et d’utiliser 33 % d’eau en moins par rapport à des bouteilles en verre à usage unique.
Par ailleurs, la consigne pour réemploi permet de diminuer le nombre d’emballages à recycler, incinérer ou enfouir en fin de vie, et donc de limiter la dispersion de polluants et nuisances due à ces modes de traitement des déchets. Elle permet aussi de s’attaquer à la pollution plastique et à son impact sur la biodiversité : de nombreuses alternatives consignées pourraient se substituer aux bouteilles en plastique, aux emballages alimentaires (bocaux, yaourts, etc.) et aux contenants de la restauration à emporter.
La consigne : une alternative aux emballages jetables ?
Oui, lorsqu’elle permet de collecter les emballages… en vue de leur réemploi (= consigne pour réemploi) ! Ceux-ci, conçus pour résister à plusieurs réutilisations, sont alors lavés puis remplis à nouveau et remis dans le circuit. Une même bouteille par exemple peut être réemployée une vingtaine de fois, et se substituer à autant de canettes et bouteilles en plastique ou en verre jetable ! La consigne peut également être appliquée sur des emballages à usage unique (= consigne pour recyclage). Dans ce cas, les bouteilles en plastique et autres canettes récupérées seront envoyées à des usines de recyclage, de manière similaire à ce qu’il se passe quand elles sont triées dans le bac de tri. L’objectif de la consigne ici n’est pas d’éviter l’emballage jetable, mais d’améliorer les taux de collecte et de tri, pour un gain environnemental bien moindre que la réutilisation.
La consigne pour réemploi : quels autres intérêts ?
Des économies d’abord ! Une fois les investissements dans un parc de bouteilles réalisés, la consigne peut permettre aux producteurs de faire des économies. En Alsace, le réemploi de ses emballages revient moitié moins cher à la brasserie Meteor, bien rôdée en matière de consigne pour réemploi. Résultat : les Alsacien·nes achètent à prix similaire voire jusqu’à 20 % moins chers leurs bières et eaux vendues dans des bouteilles consignées en grande surface, par rapport à leurs équivalents conditionnés dans des emballages à usage unique. A terme, le réemploi des emballages a également un rôle à jouer dans la redynamisation des économies locales en créant des emplois non délocalisables pour le lavage, par exemple.
La consigne pour réemploi, est-ce que ça existe déjà ?
En France, 30 à 40 % des bouteilles utilisées dans les cafés-hôtels-restaurants sont encore consignées pour être lavées et remplies à nouveau ; de nombreux fûts de bière en inox sont aussi concernés. Le système a également perduré dans les supermarchés alsaciens : 25 millions de bouteilles sont encore réemployées chaque année dans cette région et 30 % des magasins y sont équipés de machines de déconsignation. Ailleurs sur le territoire, plusieurs projets s’attèlent à faire réapparaître les bouteilles en verre consignées sur nos tables !
A l’étranger, les bouteilles réemployables sont toujours populaires dans plusieurs pays. A l’échelle de l’Europe, 21 % des boissons sont vendues dans des bouteilles réutilisables et réutilisées, mais ce taux peut monter à 82 % pour les bières en Allemagne, par exemple.
La consigne ne vaut-elle que pour les bouteilles ?
Nous avons souvent en tête l’image des bouteilles de lait ou de bière lorsque nous pensons à la consigne, or celle-ci peut s’appliquer à tout type d’emballages alimentaires : boîtes à repas pour la vente à emporter, gobelets à café, écocups dans les festivals, bacs de transport pour livrer les épiceries et commerces de bouche, bocaux, etc. Il existe également des initiatives en dehors du domaine de l’alimentaire, portant par exemple sur les emballages postaux utilisés pour la vente en ligne, la vente de cosmétiques ou produits de maquillage dans des flacons consignés, les bidons pour les produits d’entretien, etc. La consigne est également pratiquée dans le domaine industriel sur certaines palettes en bois et caisses de transport. Dans tous ces exemples, elle est un outil formidable pour RÉUTILISER plutôt que jeter !
Des exemples de boîtes à repas consignées : En Boîte Le Plat à Toulouse et Reconcil à Paris.
Pourquoi consigner ses emballages pour réemploi ?
Découvrez le fonctionnement et les avantages de la consigne sur le verre dans cette vidéo de la Fondation pour la Nature et l’Homme.
Les propositions de Zero Waste France
Pour voir se développer de nouveau ces systèmes de réemploi des emballages en verre en France, la déclaration dans une loi du retour de la consigne sera un pré-requis indispensable mais loin d’être suffisant. Il faut également lever les freins d’ordre technique, économique et réglementaire qui incitent aujourd’hui au “tout-jetable” en matière d’emballages.
Les timides avancées du quinquennat 2017-2022
La loi Anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) a fixé un objectif de réemploi des emballages (5 % en 2023 et 10 % en 2027) et a introduit le principe d’une standardisation des emballages pour réemploi via la définition de standards par les éco-organismes en charge des emballages. L’incitation au recours à ces standards a été renforcée dans la loi Climat, tandis que le montant consacré par CITEO au soutien du développement du réemploi a été augmenté de 2 % (loi AGEC) à 5 % (loi Climat) de son budget.
Parce que ces premiers pas favorables à la consigne ne suffisent pas à garantir le développement massifié de ce système, Zero Waste France prône une prise de décision ferme pour réintroduire la consigne pour réemploi des emballages sur le territoire français. Pour accompagner cette mise en œuvre, l’association porte plusieurs propositions :
Déployer la consigne pour réemploi des emballages selon une trajectoire définie
Cette trajectoire devra être élaborée par l’Observatoire national du réemploi et de la réutilisation. Prévu par les lois Anti-gaspillage et climat et résilience, son installation retardée va devoir s’opérer rapidement.
Définir une trajectoire de réduction de l’emballage à usage unique
Pour accompagner le développement du réemploi, le recours à l’usage unique doit être réduit. Cet objectif de réduction devra être responsabilisant pour les entreprises pour être opérant.
Lancer un plan d’investissement national pour le réemploi des emballages
Des investissements initiaux sont nécessaires au développement du réemploi : l’État a le devoir de soutenir le financement des infrastructures requises. Ce plan national pourra être complété par des soutiens régionaux au réemploi.
Augmenter la part du budget de la REP Emballages dédiée au réemploi
Les 5 % prévus par la loi ne permettent pas à date de financer la massification du réemploi.
Créer une taxe « usage unique »
Les recettes de cette taxe applicable aux producteurs qui dépassent un certain volume de mise sur le marché annuel d’emballages à usage unique pourraient alimenter le soutien financier au réemploi.
Rendre obligatoire la reprise des emballages en grande surface
Il s’agit de faciliter le geste de retour pour les consommateurs et consommatrices. Des expérimentations pourront être menées dans les plus petites surfaces.
Accompagner le déploiement des standards d’emballages réemployables
Le non-respect des standards d’emballages réemployables à compter de 2027 pourrait être sanctionné d’une pénalité financière.
Mobiliser davantage la commande publique
La commande publique devrait inclure des obligations d’achats de produits conditionnés dans des emballages réemployables.
Ouvrir une concertation sur une refonte de la REP
Le système de responsabilité élargie du producteur (REP) mérite d’être repensé pour le sortir de ses contradictions internes qui viennent en limiter la portée et l’efficience.
Pour en savoir plus sur les propositions de Zero Waste France :
Des actions de mobilisation citoyenne
Zero Waste France milite pour le retour de la consigne pour réemploi des emballages, qui permet leur re-remplissage après lavage et évite donc d’utiliser des emballages jetables.
La consigne pour réemploi est largement plébiscitée par les citoyen·nes, mais la volonté publique tarde à répondre à cette attente.
En 2019, lors de l’examen de la loi AGEC au Parlement, Zero Waste France a proposé aux citoyen·nes d’écrire à leurs député·es en misant sur l’originalité.
Pendant les débats autour de la loi climat en 2021, Zero Waste France a porté une lettre citoyenne à l’attention des parlementaires signée par plus de 8 700 personnes.
La campagne #ConsignezMoi
Début 2023, nous avons lancé une campagne nationale d’actions visant à interpeller les industriels, la grande distribution et les pouvoirs publics sur le retour de la consigne pour réemploi suite à l’annonce de la concertation sur la consigne des emballages par le gouvernement. Intitulée #ConsignezMoi, cette campagne a invité tou⋅tes les citoyen⋅nes qui le souhaitaient à rapporter leurs contenants en verre vides, en magasin, avec l’étiquette « Consignez-moi » et à interpeller les distributeurs et les marques sur les réseaux sociaux.
En savoir plus sur cette actionSur le terrain
Depuis quelques années, de nombreux projets de consigne pour réemployer les emballages se développent un peu partout sur le territoire français. Ces porteurs et porteuses de projet rencontrent cependant de nombreux freins techniques, législatifs ou financiers. Afin d’aider ces initiatives, Zero Waste France a participé très activement à la structuration du Réseau Consigne, une association nationale pour les rassembler, les aider à lever ensemble ces freins et leur fournir les outils et informations utiles à leur développement. Le Réseau Consigne et le Réseau Vrac ont fusionné le 15 mai 2023 au sein du Réseau Vrac & Réemploi.
+ d’infos sur le Réseau Vrac & RéemploiActualités liées
Association créée en 1997, Zero Waste France est financée en majorité par les dons et adhésions des citoyennes et citoyens. Votre soutien nous donne les moyens d’agir et de garantir l’indépendance de Zero Waste France, pour une société zéro déchet zéro gaspillage !
Un don de 30€ revient seulement à 10,20€ après réduction fiscale.
En savoir plus