Réduction des déchets dans la commande publique : ce que dit la loi anti-gaspillage (décryptage 7/7)
La loi économie circulaire modifie la réglementation applicable à de nombreux secteurs : conception des produits, information des consommateurs, gestion avale des déchets... Elle comporte également quelques objectifs et nouvelles obligations en matière de commande publique.
La commande publique, souvent citée comme un levier pour l’économie circulaire, constitue un secteur de l’économie française encore trop générateur de déchets. En parallèle, elle peut aussi permettre à de nouvelles initiatives de se développer, en particulier grâce à des volumes d’achat importants émanant d’administrations ou de collectivités de grande taille.
Réduire la consommation de plastiques
Une première disposition de la loi invite les services de l’État ainsi que les collectivités territoriales et leurs groupements à compter du 1er janvier 2021, à « réduire la consommation de plastiques à usage unique, la production de déchets » et à privilégier « les biens issus du réemploi ou qui intègrent des matières recyclées« , « dès que cela est possible« . Incantation sans opposabilité juridique, cet article aura sans doute la vertu de permettre un nouveau tour de communication à l’adresse des acheteurs pour les sensibiliser.
De manière plus ciblée s’agissant du plastique, il est prévu que « à compter du 1er janvier 2022, l’État n’achète plus de plastique à usage unique en vue d’une utilisation sur les lieux de travail et dans les évènements qu’il organise« . Juridiquement, cet article appelle une substitution de matériaux à laquelle les acheteurs pourraient privilégier un passage au réutilisable lorsque cela est possible (domaine alimentaire par exemple). L’ambition de la mesure dépendra surtout d’un décret qui précisera les situations dans lesquelles cette interdiction ne s’applique pas (risques pour la santé ou pour la sécurité, etc.).
Intégrer des matières recyclées dans les produits achetés
Une autre disposition de la loi concerne l’achat de seconde main ou l’intégration de matières recyclées. Assez générale, elle prévoit que « à compter du 1er janvier 2021, les biens acquis annuellement par les services de l’État ainsi que par les collectivités territoriales et leurs groupements sont issus du réemploi ou de la réutilisation ou intègrent des matières recyclées dans des proportions de 20 % à 100 % selon le type de produit« . Ce texte pourra constituer un socle juridique pouvant rassurer les acheteurs, parfois encore peu habitués à acheter des produits d’occasion, ou à pencher en faveur d’un sourçage de produits issus du recyclage.
Néanmoins, un travail réglementaire de longue haleine s’amorce, dans la mesure où un décret en Conseil d’État doit encore fixer « la liste des produits concernés et, pour chaque produit, les taux pouvant être issus du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage correspondant à ces produits« . Il est également inclus dans la loi une disposition balai très vague, qui pourrait potentiellement fortement réduire l’ambition du texte, puisque « en cas de […] contrainte technique significative liée à la nature de la commande publique, le pouvoir adjudicateur n’est pas soumis » à cette obligation.
Une disposition spécifique pour l’achat de pneumatiques
Un article L2172-6 est crée dans le Code de la commande publique pour favoriser l’achat de pneumatiques rechapés. La formulation de cet article le rend opposable et devrait permettre qu’il soit rapidement pris en compte par les acheteurs : « dans un souci de préservation des ressources naturelles, les achats de pneumatiques effectués par l’État, les collectivités territoriales et leurs opérateurs portent sur des pneumatiques rechapés, sauf si une première consultation s’est révélée infructueuse« .
Quelques exceptions encore, puisque néanmoins « les achats de pneumatiques portant sur les véhicules d’urgence ainsi que les véhicules militaires peuvent être dispensés des obligations prévues au présent article« .
Les conseils de Zero Waste France pour une commande publique zéro déchet
Pour passer à une commande publique zéro déchet, plusieurs étapes sont nécessaires. D’une part, il convient d’éveiller la sensibilité personnelle des acheteurs à la réduction des déchets. D’autre part, l’achat durable fait intervenir des techniques de rédaction parfois nouvelles (renvoi à des labels, spécifications techniques, critères de notation spécifiques…). Il est primordial que les personnes soumises aux règles de la commande publique forment leurs personnels à ces enjeux de rédaction.
L’anticipation est également de mise : la Ville de Paris est un bon exemple en la matière, puisqu’elle a mis en place une commission d’anticipation des achats qui, un an voire un an et demi avant le lancement des appels d’offres, les passe en revue afin d’en analyser et améliorer les clauses sociales et environnementales. D’autres retours d’expériences sont à retrouver au sein de l’ouvrage « Territoires Zero Waste » qui dédie un chantier spécifique à la commande publique durable.