Traité mondial sur la pollution plastique : des avancées insuffisantes pour la 4e session de négociations (INC-4)

La 4e session de négociations internationales sur la pollution plastique (INC-4) a pris fin cette nuit. Pour Zero Waste France, les progrès sont réels, mais encore insuffisants. Elle appelle à poursuivre les efforts en faveur d’un objectif mondial de réduction de la production de plastique et à soutenir une transition juste.

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Accord sur les travaux en intersession

Si le 3e cycle de négociations à Nairobi s’était achevé sans accord sur la suite des travaux, cette 4e session a permis d’obtenir de timides avancées en vue de la conclusion d’un traité international d’ici la fin de l’année 2024. En effet, un accord a été trouvé pour l’organisation de travaux en intersession. Ces travaux porteront sur le mécanisme financier, ainsi que sur les produits plastiques, les substances chimiques préoccupantes dans les produits plastiques, la conception des produits, le réemploi et la recyclabilité.

Néanmoins, les Etats ont décidé d’exclure les mesures portant sur l’extraction de matières premières et la production de plastique des travaux en intersession. Pour le mouvement Break Free From Plastic [1], dont Zero Waste France fait partie, “ce compromis réduit l’ambition de ce processus car il ignore le rôle central de la production de plastique dans l’alimentation des crises du climat, de la biodiversité et de la pollution. Il s’agit non seulement d’une déception totale, mais aussi d’une occasion manquée de s’attaquer aux causes profondes de la pollution plastique de manière globale”.

Couper le robinet de la production, une urgence

Chaque jour, davantage de personnes sont victimes de la pollution plastique. Il y a urgence à mettre fin à ce fléau”, alerte Charlotte Soulary, responsable du plaidoyer de Zero Waste France, qui a assisté aux négociations à Ottawa. “Qu’il s’agisse de lister les matières et produits à interdire ou de financer la transition, des pas concrets seront indispensables ces prochains mois pour faire progresser la négociation. Mais ces progrès seront vains si l’on ne coupe pas le robinet de la production !

Une étude publiée ce 24 avril dans la revue scientifique Science Advances [2] révèle la corrélation directe entre la production et la pollution plastique. Une hausse de 1% de la production de plastique des entreprises de la grande consommation est en effet associée à une augmentation de 1% de la pollution plastique dans l’environnement. Par ailleurs, l’étude montre que seules 56 multinationales sont responsables de plus de la moitié de la pollution plastique liée aux marques de grande consommation.

L’éléphant dans la pièce : la réduction de la production à la source

Malgré les blocages, des avancées ont pu être notées en faveur de la nécessaire réduction de la production de plastique à la source. Ainsi, le Rwanda et le Pérou ont proposé cette semaine un objectif de réduction de la production de plastique de 40% de 2025 à 2040. Ils ont également signé avec 26 autres pays, dont la France, la déclaration sur les polymères plastiques primaires [3], afin de demander un traité international qui couvre la totalité du cycle de vie du plastique, y compris à travers des mesures de prévention de la surproduction en amont.

En proposant un objectif de réduction de la production, le Rwanda et le Pérou ont fait preuve d’un véritable leadership pendant ce cycle de négociations”, analyse Charlotte Soulary. “C’est l’éléphant dans la pièce : pour en finir avec la pollution plastique, il faut réduire sa production à la source. S’il n’y a pas de consensus là-dessus, il faut passer au vote et laisser la majorité décider”.

A l’autre extrémité du spectre, un petit groupe de pays producteurs d’énergies fossiles et de plastiques, incluant l’Arabie saoudite, l’Inde, le Koweït et le Qatar, continue de remettre en question le processus de négociations, afin de tenter de réduire le champ d’application du traité aux questions liées à la gestion des déchets.

La présence des lobbys en hausse

La présence des lobbys des énergies fossiles et du plastique s’est également faite plus pressante à Ottawa. Selon une analyse de CIEL, Greenpeace US, Break Free From Plastic, IPEN, GAIA, et EIA US [4], 196 lobbyistes des énergies fossiles et de la pétrochimie étaient accrédités pour participer à cette 4e session de négociations, un nombre en hausse de 37% depuis le cycle précédent à Nairobi. Des publicités en faveur du plastique ont également été diffusées à proximité du site des négociations.

Les lobbyistes du plastique sont quatre fois plus nombreux dans ces négociations que les représentant·es de la communauté scientifique”, souligne Charlotte Soulary. “L’industrie fossile voit le plastique comme le plan B idéal dans un contexte de transition énergétique. Mais une bombe climatique en cache une autre ! Nous devons rester extrêmement vigilants face à l’entrisme de ces acteurs dans les négociations internationales sur l’environnement. La seule voie à suivre devrait être de laisser les lobbys à la porte.

Un mécanisme financier dédié pour une transition juste

A Turin aujourd’hui [5], les pays du G7 ont précisé la déclaration faite à Sapporo en 2023 [6], et se sont engagés à “prendre des mesures ambitieuses tout au long du cycle de vie des plastiques pour mettre fin à la pollution plastique”. Le G7 va également plus loin, en “appel[ant] la communauté mondiale à faire de même”. En vue de la 5e session de négociations, qui aura lieu du 25 novembre au 1er décembre à Busan (Corée du Sud), ces engagements restent à concrétiser, également à travers un soutien fort à un mécanisme financier dédié pour la mise en œuvre du traité.

“La transition doit être juste et c’est pour cela que nous attendons une plus grande implication des pays les plus consommateurs de plastique sur les aspects financiers”, rappelle Charlotte Soulary. “Les pays premiers responsables doivent s’engager en faveur de ressources financières conséquentes, au niveau de ce qui est nécessaire pour mettre un terme à l’ère du plastique”.

Notre campagne

[1] Break Free From Plastic, INC-4 negotiating countries fail to respond to the magnitude of the plastics crisis, 30 avril 2024

[2] Win Cowger et al., Global producer responsibility for plastic pollution, Science Advances, 24 avril 2024

[3] Un pont vers Busan : Déclaration sur les polymères plastiques primaires, avril 2024

[4] CIEL, Fossil Fuel Lobbyists Outnumber National Delegations, Scientists, and Indigenous Peoples at Plastics Treaty Negotiations, 25 avril 2024

[5] Libération avec AFP, Pollution : le G7 s’accorde sur la fermeture des centrales à charbon sans captage de carbone, 30 avril 2024

[6] G7 Climate, Energy and Environment Ministers’ Communiqué, 16 avril 2023

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