Vote en Commission de la LTE : les Sénateurs tournent en rond

Réunis en Commission spéciale le 10 juin 2015, les sénateurs ont amendé le texte de la Loi de transition énergétique pour la croissance verte. Sur le volet économie circulaire, ils ont tout fait pour revenir sur la version sortie de leur chambre en première lecture, piétinant toutes (ou presque) les avancées de l’Assemblée nationale.

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Sur proposition de la sénatrice Jouanno, presque tous les rapports thématiques du gouvernement au Parlement ont été supprimés. Arguant qu’ils n’étaient jamais transmis, sous-entendant ainsi que l’administration ne fait pas son travail, elle a ainsi passé à la moulinette le rapport sur l’expérimentation d’affichage de la durée de vie des produits, l’extension de garantie à 5 voire 10 ans, ainsi que celui sur la composition des combustibles solides de récupération (CSR) et les marges d’amélioration en matière de tri et de substitution des matériaux. Quand on sait que ce sont notamment les rapports du MEDDE au Parlement qui ont permis de lancer le débat sur la fiscalité déchets, l’argument semble pétri de mauvaise foi. Si ces rapport ne constituent pas une fin en soi, ils avaient au moins le mérite d’obliger le gouvernement à se saisir des questions sur lesquelles il n’est pas prêt à légiférer. Le rapport sur la composition des CSR était notamment un garde-fou pour éviter le développement sauvage d’une filière dont la viabilité repose sur la pérennité de résidus de tri, alors même que la France et l’UE se sont données comme priorité  la réduction à la source. Les sénateurs ne semblent pas avoir pris conscience de l’enjeu, puisqu’ils ont en outre modifié le texte pour encourager le développement de la filière, là où les députés avaient joué d’une saine prudence en proposant un cadre réglementaire spécifique.

Concernant les déchets organiques, les sénateurs ont à nouveau fait preuve de frilosité, en réaffirmant leur demande d’une étude d’impact sur la généralisation du tri à la source des biodéchets. Les nombreux exemples de collectivités faisant le tri à la source des biodéchets en France, mais surtout partout en Europe, semblent ne pas être suffisants pour rassurer nos sénateurs…. mais le seront-ils un jour ? Il n’est de secret pour personne que la demande d’une étude d’impact est un moyen avéré pour faire trainer toute avancée…

Balayant d’un revers de la main la hiérarchie dans l’utilisation des ressources qu’ils ont eux-mêmes adopté, et la hiérarchie des modes de traitement qui donne la priorité à la prévention, les sénateurs ont à nouveau remplacé l’interdiction de la vaisselle jetable en plastique par une obligation de tri à la source. Ils ont bien sur prétexté des difficultés de mise en œuvre. Et pourtant, à cœur vaillant rien d’impossible… sauf quand le lobby du plastique s’en mêle !

Même reculade sur les sacs de caisse, dont les biosourcés compostables domestiquement sont désormais exemptés d’interdiction. Passons sur le fait que le « compostable domestiquement » pour un sac de caisse de taille et de solidité suffisante pour justement transporter une quantité raisonnable de commissions, n’existe pas… parce qu’il doit par essence être suffisamment fin pour se dégrader rapidement. Zero Waste France félicite le Club Bioplastique pour son lobbying fructueux, et s’excuse auprès des pays en développement qui ne pourront bientôt plus se nourrir à cause d’une pression trop forte sur les cours mondiaux des matières agricoles. « Ils ont faim, mais qu’ils mangent des sacs en bioplastique ! » aurait dit Marie-Antoinette.

Seule la filière REP papier semble avoir trouvé grâce auprès d’une majorité de sénateurs, qui ont réinstauré la contribution de la presse, sauf politique, générale et professionnelle qui pourront passer par la publicité pour soutenir Eco-Folio. Notons que les sénateurs ont réussi à tenir bon face au chantage absurde de l’industrie papetière, de Federec et d’Eco-Folio qui souhaitent faire disparaître l’objectif de 30 % de réduction de l’utilisation de papier dans l’administration. Comment peut-on s’opposer à la prévention d’un tel gaspillage sans rougir ? Ce n’est certainement pas cet objectif qui mettra en péril la filière papetière française, qui plutôt que de s’apitoyer sur son sort devrait sauter sur l’opportunité que lui donne la suite de l’article 19 sexies en fixant des objectifs d’utilisation de papier recyclé.

Les Sénateurs doivent maintenant se prononcer le 30 juin en séance. De nouvelles reculades sont à prévoir. L’Assemblée nationale devrait ensuite repartir de son propre texte de 2ème lecture et décider d’intégrer ou non les amendements votés par le Sénat.

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