À vos marques, prêts, attaquez : Zero Waste France porte plainte contre Adidas et New Balance pour greenwashing
Alors que les soldes d’été 2022 démarrent, Zero Waste France attaque Adidas et New Balance pour leur communication mensongère. « 100% recyclé », « privilégiant l'environnement », « solution contre les déchets plastiques »... Quand les marques entendent sauver la planète en vendant des baskets, Zero Waste France sort le carton rouge.
Une plainte fondée sur le délit de pratique commerciale trompeuse
Avec ses slogans « Made to be remade » (« Fait pour être réutilisé ») et « End plastic waste » (« Mettons fin aux déchets plastiques »), Adidas utilise à tort et à travers l’argument du recyclage pour affirmer que certains de ses produits permettent de réduire l’empreinte carbone de celles et ceux qui les achètent. En particulier, les baskets « FutureCraft Footprint » sont vendues comme un moyen de « préserver la planète », sans dire un mot de l’impact environnemental du polyester recyclé ni de l’impossibilité technique de son recyclage à l’infini…
New Balance n’est pas en reste : sa « norme » green leaf (« feuille verte»)- à laquelle répondent pas moins de 351 produits mis en vente sur le site internet de la marque – repose sur la présence « à 50 % ou plus » de matériaux issus « de sources privilégiant l’environnement ». Un grand flou recouvrant une multitude de réalités qui ne respectent pas toujours les critères que la marque s’est elle-même fixée, par exemple une semelle extérieure contenant 5 % de matières recyclées pour les baskets « 574 Core », et sans information sur la fin de vie du produit.
De tels arguments, imprécis, ne reposent pas sur une analyse sourcée du cycle de vie du produit et exagèrent éhontément son impact environnemental positif : on a affaire ici à un flagrant délit de greenwashing – traduit en français par « éco-blanchiment ». Ces allégations environnementales mensongères, de nature à induire les consommateurs et consommatrices en erreur sur l’impact environnemental des produits et les engagements environnementaux des marques, font partie des pratiques commerciales trompeuses interdites par la loi française (articles L. 121-2 et suivants du Code de la consommation). Il s’agit d’un délit, passible d’une peine de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 300 000 euros, augmentée si la pratique concerne des arguments environnementaux.
Du nouveau depuis la loi Climat
Pour information, la loi Climat et résilience du 22 août 2021 a ajouté un article dans le Code de l’environnement selon lequel les publicités affirmant qu’un produit est neutre en carbone sont interdites, sauf si l’annonceur démontre comment les émissions de gaz à effet de serre sont évitées et/ou réduites et compensées. Cet article entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2023 et constituera un fondement juridique supplémentaire pour lutter contre le greenwashing de certaines enseignes.
L’argument de la présence de matériaux recyclés pour affirmer un impact environnemental positif du produit (voire un sauvetage de la planète par cet achat…) fait fureur parmi les marques de fast fashion. En cultivant l’imprécision et en recourant à des formules trompeuses, ces arguments encouragent et déculpabilisent la surproduction puis l’achat de produits textiles neufs qui alimentent in fine la surexploitation des ressources naturelles et la production de déchets.
Non, fabriquer de nouveaux produits en matières recyclées ne lutte pas contre la pollution plastique
Adidas et New Balance, comme de nombreuses autres marques ces dernières années, clament que leurs produits préservent l’environnement car ils sont composés en partie de matériaux recyclés.
D’une part, ces annonces manquent souvent de précision et ont recours à l’exagération. Par exemple, quand Adidas annonce « 50% de matériaux recyclés » au sujet de ses baskets « FutureCraft Footprint », les petites lignes indiquent que seule la tige de la chaussure (dont on ne sait pas quelle proportion du produit elle représente) est en réalité composée pour moitié de matière recyclée. Idem pour les chaussures « 574 Core unisexe » de New Balance, dont seules les mailles de l’empeigne (partie supérieure de la chaussure), du col et de la languette sont composées de polyester recyclé.
D’autre part, les marquent affirment qu’une composition en polyester ou autre matériau recyclé représente une « solution pour lutter contre la pollution plastique ». Or, le processus de recyclage est loin d’être neutre pour l’environnement. D’abord, parce qu’il est gourmand en énergie et en eau. Ensuite, parce que la production de matériaux recyclés implique dans la plupart des cas l’incorporation de matière vierge. Enfin, parce que le recyclage n’est jamais infini : la matière se dégrade au fur et à mesure des cycles de recyclage. Si toutes les marques se mettent au polyester recyclé pour verdir leur image, il faudra bien continuer à produire du polyester pour qu’on puisse ensuite le recycler… Or d’après l’Atlas du plastique, la production de fibres synthétiques en polyester représente 706 milliards de kg d’équivalent CO2, soit autant que les émissions annuelles de 185 centrales à charbon. N’oublions pas par ailleurs que le recyclage d’un produit devient le plus souvent impossible lorsque la matière plastique recyclée est mélangée à d’autres matières – ce qui est presque systématiquement le cas concernant les baskets.
Comme l’a justement rappelé le Jury de déontologie publicitaire dans un avis visant une publicité d’Adidas, l’argument de réduction du plastique par la commercialisation de produits composés de plastiques recyclés est faux. En effet, à la fin de leur vie, les produits seront immanquablement jetés. S’ils ne sont pas recyclés, ils viendront alimenter le flux de déchets plastiques et contribuer à la pollution qui en résulte. C’est d’autant plus vrai avec le polyester recyclé, matériau majoritairement utilisé par les marques de sport : c’est une matière très polluante à la production et dont l’usage la dégrade en microplastiques, un désastre pour la santé humaine et la biodiversité.
Zero Waste France s’oppose à ces pratiques commerciales illégales et espère que le dépôt de cette plainte aboutira à des sanctions pénales à l’encontre des marques Adidas et New Balance. Plus globalement, l’association réaffirme l’insoutenabilité de la fast fashion, dont le modèle de surproduction fait de l’industrie textile l’une des plus polluantes au monde : d’après une étude de 2018 du cabinet Quantis, les secteurs du vêtement et de la chaussure ont été à l’origine de 5 à 10 % de la pollution dans le monde en 2016. L’urgence est à l’action des entreprises pour réduire la production et garantir la durabilité des produits, plutôt qu’à la poursuite du tout-jetable sous couvert de recyclage.
Participez à la mobilisation #OnLaissePasPasser
Ah les publicités pleines de greenwashing, il y en a un paquet ! Comme on ne peut pas porter plainte contre toutes les marques, aidez-nous à mettre la pression aux marques en les interpellant via différents moyens.
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